Celui qui, suisse, compositeur, chef d'orchestre et hautboïste parmi les plus renommés, aujourd'hui encore fait sienne cette interdiction, édictée par Sándor Veress, son premier professeur de composition, d'écrire une seule note qui ne soit pas défendable sur le papier, nous fait toucher du doigt, avec "Psalm", les limites sur lesquelles " travaille toute bonne musique ". Dans cette composition de 1971, Holliger assimile, façonne et déconstruit à la fois le texte d'un poète à l'intense inventivité lexicale et grammaticale, gommant les mots au profit des expirations, souffles ou gémissements étouffés, renforçant de sa propre incarnation des horreurs de la Shoah celle de Paul Celan. Un autre exemple est celui de Choral Utopia, uvre plus tardive qui donne son nom à l'album, où le compositeur divise le chur en trois groupes de douze voix, chacun " accordé " d'une façon différente : les trois chantent, l'un tel qu'écrit, l'autre un tiers de ton au-dessus, le troisième un tiers de ton en-dessous, un texte agencé pour que les voyelles coïncident. Le résultat en est bluffant, déroulant les différents sons en une couche sonore dense et sobre à la fois. (Bernard Vincken)